Le Protestantisme à Bois le Roi

Mettant fin à de nombreuses années de Guerre Civile qui n'épargnèrent d'ailleurs pas notre région Henri IV signa à Nantes, le 13 Avril 1598, un édit établissant en France la liberté d'exercice du culte.
Le 4 mai 1600, Henri IV désigne un catholique, le Président Janin et un protestant, M. de Montlouet pour élire un lieu de culte pour Fontainebleau . Ce fut Bois le Roi qui fut choisi. Pourquoi ? A cette époque, Bois le Roi comptait 928 habitants dont vraisemblablement aucun n'était protestant .
L'emplacement choisi fut le Chaumard, c'est-à-dire au sud du village, à l'extrémité de la plus grande rue, rue appelée aujourd'hui, rue Guido Sigriste. Ce lieu avait été choisi pour deux raisons : la première était qu'on ne voulut pas construire un lieu du culte à Fontainebleau, ville où se trouvait le Roi, officiellement "catholique"
( ce qui aurait été quelque peu gênant ) .
D'autre part, ce lieu-dit le "Chaumard" n'était pas trop éloigné de Fontainebleau, de manière à ce que les courtisans et amis du Roi restés protestants puissent aller célébrer leur culte, sans trop de difficultée et sans avoir trop de chemin à faire ( 8 kilomètres ) . Par ailleurs, ce lieu choisi se trouvait tout près de la route de Bourgogne très fréquentée à cette époque pour se rendre à Fontainebleau et où était située à proximité de ce futur temple une Hostellerie : l'Hostellerie des Hautes Loges. Il était donc facile de venir de Fontainebleau à ce lieu d'exercice . Enfin une des grande voies d'accès vers le Château était la Seine où passait le coche d'eau qui s'arrêtait à Bois le Roi et qui amenait de nombreux voyageurs vers le lieu où se trouvait la Cour .
Ce fut vers 1600 que fut construit ce temple .Un cimetière lui fut adjoint , il se trouvait à l'angle de la rue Guido Sigriste et de ce que l'on appelle la rue de la Presche, à droite en montant du village vers la Forêt. D'ailleurs deux corps furent retrouvés lors de la construction de la maison . Ce temple de Bois le Roi lorsque la Cour était à Fontainebleau était très fréquenté.
Elie BENOIT, historien de l'Edit de Nantes parle en ces termes de Bois le Roi:
" Il n'y avait presque personne la plupart de l'année, le Ministre avait résidé longtemps à Paris, quoi qu'il y eut 14 lieues de distance, mais quand le Roi était à Fontainebleau, le temple était fort plein à cause que tous les réformés qui suivaient la Cour y allaient faire leurs exercices et le lieu n'était pas si éloigné qu'ils ne pussent en un jour s'acquitter des devoirs de la religion envers Dieu et de ceux de sujétion envers leur Prince " .
La faible activité du temple est attestée par les documents d'époque :
En 1670, on enregistre : 4 baptêmes, 4 enterrements .
En 1671: 3 baptêmes, 3 mariages, 4 enterrements .
En 1672: 3 mariages .
En 1673: 3 baptêmes, 1 enterrement, 2 mariages .
Dans le registre de l'Etat-Civil protestant de Bois le Roi nous ne relevons aucun habitant du Pays .
Pendant ces 85 ans d'existence le temple de Bois le Roi sera très renommé dans la Généralité de Paris ainsi que ceux de Grigny, Ablon, et Charenton .
La qualité de ses pasteurs y sera pour beaucoup . On relève parmi les plus illustres, Guy de SOULAS, Ferdinant de PREZ, Henri DRELINCOURT qui d'ailleurs se maria à Bois le Roi en 1671 .
Il serait très long de décrire les influences importantes qui agirent sur LOUIS XIV pour en arriver à la révocation de l'Edit de Nantes et la destruction du temple de Bois le Roi .
L'arrêté du Roi dit : " le temple sera démoli jusqu'à son fondement et ce par les dits religieux prétendument réformés dans le mois qui suivra la notification de l'Arrêt, sinon ils paieraient les frais de la démolition qui sera faite par les soins du Syndic du Diocèse de Sens " .
Cet Arrêt devra être affiché aux portes de l'église Saint-Louis de Fontainebleau, au carrefour de la Halle , au Marché aux blés ainsi qu'à Bois le Roi, sur la porte de l'Eglise et à la porte du prêche .
Les protestants ne mirent pas beaucoup d'enthousiasme à détruire leur temple
Un mois passa et le Mardi 11 Août 1682 les maçons vinrent de Fontainebleau procéder à sa démolition, sous la conduite du curé de Bois le Roi, Claude MARTIN et de ses deux vicaires .
Le registre paroissial de Bois le Roi contient cette note : " le Sieur Curé a monté le premier sur l'un des pignons du temple qu'il a démoli pour la plus grande gloire de Dieu et à l'honneur du Roi " ...
Le Pasteur de Bois le Roi Antoine GUERIN quitta évidemment Bois le Roi, partit pour la Hollande et devint, à Leyde pasteur d'une église de réfugiés, laissant ses ouailles qui étaient d'ailleurs en fort petit nombre puisqu'à l'époque dans toute la généralité de Melun, on ne dénombrait que six familles protestantes .
Il ne reste rien à l'heure actuelle de ce temple ; néanmoins, une rue de Bois le Roi porte le nom de la rue de la Presche, après avoir porté celui du Sentier des Ministres, nom qui lui avait été donné à l'époque du temple .


Ordre de démolition du temple





Le pasteur Henri Drelincourt

Entre la "plaine de Sermaise", qui va au Nord, jusqu'a la Seine, et la "plaine de Bois le Roi", dans laquelle commence , au sud la forêt se trouve un plateau plus long que large.Dans la partie du village située sur le flanc septentrional de ce plateau est l'église catholique. Le quartier méridional, le "Bout-d'en-haut", ou les "Hautes-Loges", était sur le plateau même. C'est là, à l'extrémité de la Grand Rue, plus tard appelée rue de France, et maintenant ( du nom d'un peintre suisse ) Guido Sigriste, que fut fixé l'emplacement du " lieu d'exercice ". Il y a encore là une rue de la Prêche, une des rares voies qui n'aient pas changé d'appellation depuis trois siècles et demi, tandis que, à coté le "Sentier des Ministres" est devenu "Chemin des Signeaux", puis "rue Colinet", entre le Pavé-de-la-Cave et la rue Dénecourt .
Cet endroit était facile d'accès pour les fidèles venant en carrosse, à cheval, ou à pied, par la "route de Bourgogne" toute droite entre les deux "étoiles" forestières de la Table du Roi et de la Croix de Toulouse . Lorsqu'on allait de Fontainebleau à Paris, un premier relais "l'Hostellerie des Hautes Loges" se trouvait précisément vers le poste forestier actuel dit de Bois le Roi.


Avant de chercher, sur les lieux actuels, l'emplacement exact du temple, nous déterminerons d'abord, ce qui est en l'espèce, plus facile, l'emplacement du cimetière .
Il semble même qu'il y eut successivement deux cimetières, le premier sans doute, s'étant trouvé bientôt entièrement rempli .
Les principaux vestiges des temps passés subsistant à la surface du sol sont un puits . Montons la rue de France
( ou plutôt la rue Guido Sigriste ) jusqu'au carrefour où elle cesse de s'appeler ainsi et devient rue Désiré Bourgoin . Avant d'arriver au carrefour, à gauche, voici un grand champ plus élevé que la route, avec un puits flanqué de deux petits murs en vieilles pierres. C'est un "puits commun" auquel les habitants sur la rue avaient libre accés . Ensuite une maison basse , qui ne se trouve plus à l'alignement de la rue actuelle ; Le long de la rue, les fondations d'un mur ancien ont 1 m.20 de hauteur et 0 m.60 de largeur . D'après une tradition, sans preuve certaine, on à cru que là se trouvait un cimetière, entre le puits, peut-être, et la "rue de la Prêche" qui à gauche, porte ce nom jusqu'à la scierie, vers le Sud-Est .
A droite, elle s'appelle aussi de même . Il y a là, en face la propriété Brouillot, à l'angle nord-ouest du carrefour, une maison moderne avec jardin clos d'un mur moderne également . Mais contre ce mur, est un édicule, à une quinzaine de mètres de la rue Guido Sigriste , et large d'environ un mètre et demi. Il surmonte une fosse dans laquelle ont été accumulés des ossements . Une première découverte fut faite en 1861 par M. Cribier ( François ) creusant pour établir l'escalier de sa cave .
Lorque les Ponts et Chaussées établirent le niveau actuel des rues, en 1870, M. Cribier ( Auguste ) propriétaire du terrain dut abaisser le niveau de sa cour : il eut la surprise de découvrir alors un grand nombre d'ossements . Les uns étaient dans le jardin actuel, les autres sous le "Sentier des Ministres" appelé ensuite Rue de la Prêche, qui était alors beaucoup moins large que la rue actuelle . Auguste Cribier fit, en 1906 de nouvelles fouilles
( avant que , le 1 er novembre 1908 , pour la Fête de la Réformation, quelques protestants de Fontainebleau et Melun se fussent groupés au carrefour voisin ). Perpendiculairement à la rue, vers laquelle se trouvait les cranes, douze squelettes, sur deux rangs, furent trouvés : plusieurs de grande taille et avec de belles dents, provenaient, bien probablement de ces hommes d'élite qu'étaient les gardes suisses ou écossais .
Ailleurs on trouva des monnaies, aucun autre vestige que de gros clous et des fragments de bois provenant des cercueils ; aucun bijou, aucune pièce de métal ; ce qui est bien conforme à la simplicité des inhumations selon la discipline réformée . Que faire de ces restes ? Supposés hérétiques en raison du voisinage immédiat de la rue de la Prêche, ils ne pouvaient être réinhumés en "terre bénite" dans le cimetière paroissial. M. Cribier, en 1870 les mit dans une fosse qu'il reboucha ensuite. Ils y sont encore .
A cette époque, les moyens les plus variés étaient employés pour circuler, en particulier pour venir au temple. Les campagnards venaient à "pieds", souvent de fort loin, par des chemin boueux : les bourgeois et les gentilshommes venaient à "cheval" : on voyait même le mari et la femme sur un seul coursier, parfois on circulait en "litière" : au contraire, dans sa vieillesse, Louis XIV est poussé dans une "chaise roulante" : c'est dans cet appareil que le pasteur Asselin le voit passer le 21 octobre 1685, quatre jours avant la Révocation, revenant de la chasse .
Au commencement du XVIIieme siècle les "carrosses" devinrent à la mode chez les gens riches. En 1617, un carrosse de la cour transporte le jeune landgrave de Hesse, toujours assidu au culte .
C'est en "chaise de poste" que le pasteur Chamier arrivait du fond de sa province à la cour, et en repartait jusqu'à Paris dans une autre "chaise" attelée de trois chevaux .
Les disséminés éloignés, comme ceux de la vallée du Lunain, qui rejoint celle du Loing et la route, au sud de Moret, avaient jusqu'à cinquante kilomètres à parcourir pour faire célébrer baptêmes et mariages à Bois le Roi ou y faire enterrer par exemple le seigneur de Nonville, William Davisson .
La voie de terre n'était pas seule employée .
En ce temps on remontait la Seine de Paris à Charenton par le "coche d'eau", de Paris à Corbeil par le "corbillard". Il est probable que les riverains venaient parfois en barque de Samoreau par exemple, en amont du pont de Samois jusqu'à la Cave , port de Bois le Roi .

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